Témoigner et raconter sa vie
Une biographie peut permettre de témoigner sur la maladie : c’est ce que Mathilde a souhaité faire pour ses enfants, afin de leur expliquer son parcours.
Ensemble, nous avons remonté le temps depuis l’enfance, puis l’adolescence et enfin l’âge adulte, afin de relier les étapes d’une vie marquée par les joies et les peines, jusqu’au diagnostic de la maladie. Une façon de donner à voir un parcours animé par une grande force de vie.
Il est toujours difficile de revisiter un passé douloureux afin de le transmettre. Lors de nos entretiens, nous avons cherché les mots qui permettraient à Mathilde de transmettre son histoire de la façon la plus claire possible. Mettre son écoute et son écriture au service d’un projet de transmission, écrire pour l’autre lorsque cela s’avère trop difficile, c’est précisément le travail du biographe.
Pour ce témoignage, je me suis également aidée des textes déjà écrits par Mathilde, qui ont en partie été intégrés au livre. Son journal, les ateliers théâtre ont en effet été une base solide qui m’ont permis de mieux la comprendre. Nous y avons également joint des photos, des documents afin de créer un livre sur mesure. Le résultat est à l’image de Mathilde : clair, sans concession et plein d’un féroce appétit de vivre. Quelle chance d’avoir pu l’accompagner dans l’écriture de son témoignage, et d’être le passeur d’une parole comme la sienne !
L’extrait à consulter évoque la longue période d’errance médicale qui a précédé l’annonce de la maladie.
Quelques lignes pour témoigner
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Cet été-là, nous avons quitté l’impasse Toussaint-Louverture pour nous installer rue Taffanel.
L’arrivée dans une grande maison où chaque enfant avait sa chambre était une délivrance. Je m’accrochais à cette perspective persuadée qu’une fois chacun dans leur chambre, les enfants arrêteraient de se réveiller la nuit, me permettant enfin de me reposer.
L’été est passé et en septembre Philéas ne se réveillait plus la nuit. Tout le monde était reposé, sauf moi. J’étais toujours aussi fatiguée, les migraines ne me laissaient aucun répit, ma vue baissait chaque jour un peu plus et j’entendais de moins en moins bien. Je n’allais pas bien du tout et je m’inquiétais de cet état qui durait. Comme prévu, je suis retournée voir le médecin, qui a diagnostiqué une dépression post-partum. J’avais beau lui dire que j’étais heureuse, que ma famille, mes trois enfants me comblaient, rien n’y faisait. Elle s’obstinait : les migraines, la vue qui baissait, la fatigue qui m’empêchaient de mener une vie normale étaient bel et bien les signes d’une dépression. J’avais le sentiment de ne pas être entendue.
Une fois encore, la psychiatre n’était pas du même avis. Pendant toute la période qu’a duré cette errance, elle a été la seule à me croire, à me réconforter, à me dire «Vous n’êtes ni folle, ni fatiguée. Je ne sais pas de quoi vous êtes atteinte, mais vous êtes malade». Elle est, pendant ces longs mois, le seul médecin qui m’a accordé sa confiance.
J’ai décidé à ce moment de changer de coiffure. Lorsque j’étais enfant, ma mère me faisait couper les cheveux très courts, sans doute à cause des poux. Je trouvais ça affreux. Dès que j’ai pu choisir, je les ai portés longs. J’avais l’impression d’être protégée, comme si je pouvais me cacher derrière la grande mèche me barrait le visage.
Depuis que je me sentais si mal, j’avais l’impression que mon corps ne m’obéissait plus. Je ne décidais plus de rien : j’allais d’un médecin à un autre sans trouver de réponse. Personne ne semblait voir ce qui m’arrivait. Couper mes cheveux, c’était le moyen de reprendre un peu le contrôle, de choisir ce que je faisais de mon corps alors que tout m’échappait.
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Pour en lire plus…
Pour découvrir un extrait plus long de la biographie » Trois fois Mathilde « , téléchargez le PDF, bonne lecture !
Mathilde témoigne également de son parcours au quotidien sur son compte instagram
